Rasage : rien de mieux que le sabre !

À l’heure de la vitesse et des rasoirs ultra high-tech, il demeure un groupe d’irréductibles adeptes du rasage à l’ancienne : les pogonotomes !

Il y avait des signes imperceptibles du retour à la tradition : la naissance du Coupe-Chou Club il y a dix ans, forum riche en conseils et passage quasi obligé des novices ; ensuite, l’ouverture de nombreux salons de barbiers dans la capitale et en province. Puis vint Daniel Craig, alias 007. Il profita d’une scène particulièrement sensuelle de l’opus Skyfall pour se faire raser de près par la ravissante Naomie Harris. De cet épisode est né un engouement pour le rasage traditionnel dont l’esprit dépasse largement la fonction. La « pogonotomie » désigne l’art de se raser quelle qu’en soit la technique. Cependant, par métonymie, ce terme semble davantage s’adresser aux amateurs de rasoirs droits (on dit également « coupe-chou », « cc » ou encore « sabre »). La redécouverte de cette méthode de rasage a séduit un grand nombre d’hommes de toutes conditions sociales et de toutes nationalités, et il n’est pas rare qu’à travers le monde, des clubs d’amateurs se constituent, d’anciennes manufactures rouvrent leurs portes et que de talentueux artisans forgent des sabres de facture contemporaine.

Un coupe-chou seul ne sert à rien. Il faut le cuir pour l’affiler, le bon blaireau pour faciliter son passage sur la peau.

10 ÉTAPES

1 -Demander conseil

Avant de se lancer dans cette aventure qui, contrairement à la rumeur, n’est pas spécifiquement dangereuse, mieux vaut suivre une formation ou prendre conseil afi n d’éviter de mauvais achats d’une part, et la prise de mauvaises habitudes d’autre part.

2 – Avoir le bon rasoir

Le débutant pourra aisément trouver le rasoir qui lui correspond, que ce soit celui de son grand-père ou un autre acquis en brocante, sur les ventes en ligne, chez un artisan ou auprès d’un pogonotome averti. Pour savoir si la peau réagit mieux à une lame pleine (wedge) ou évidée, acquérir, échanger, collectionner les lames permettra au nouvel adepte de fixer son choix définitif sur l’instrument le mieux adapté à sa barbe.

3 – Prendre le temps

L’utilisation d’un sabre, instrument qui offre le rasage le plus effi cace tout en supprimant poils incarnés, boutons, irritations et rougeurs, ouvre un champ particulier à l’homme qui désire retrouver les gestes ancestraux. En effet, le stress de notre société, qui exige de ses participants toujours plus d’efficacité et de rapidité, nous fait oublier le temps précieux du repos, du recul, du moment d’intimité avec soi où l’on va désirer se retrouver seul face à son miroir. Se raser au coupe-chou est comme une forme de méditation où peuvent se bousculer les notions d’élégance, de particularisme, de respect de soi : prendre 10 minutes pour se raser bien au lieu de 3 pour se raser mal est un choix que les pogonotomes ont fait depuis l’achat de leur première lame.

4 – Affiler son rasoir

Un coupe-chou seul ne sert à rien ! La qualité du rasage, en dehors de la technique et de la préparation, dépend essentiellement du temps que l’on mettra à entretenir le fi l. C’est la raison pour laquelle le nouvel adepte devra, en plus de son sabre, acquérir un cuir, sous forme soit de raquette dite « paddle » (de tradition française), soit de lanière appelée «strop » (utilisée dans le monde anglo-saxon). Vu au microscope, le fil d’un rasoir étant composé de micro-pointes, il convient de les aplanir par de longs passages en x sur le cuir, le fi l ainsi restitué procurant le rasage le plus doux. Apprendre à affiler son rasoir est l’un des premiers gestes à acquérir, peut-être le plus important.

5 – Respecter le sens de pousse du poil

Pour une performance optimum, la pratique du sabre doit prendre en compte les reliefs du visage et le sens de pousse du poil. Couper un poil en contrariant sa pousse naturelle peut être la cause d’irritations. C’est la raison pour laquelle il est préconisé au novice d’utiliser un morceau de coton qu’il passera, à sec, sur toutes les zones du visage : les filaments restant accrochés indiqueront le sens de coupe.

6 – Adoucir la barbe

Pour faciliter un rasage, il convient au préalable d’adoucir la barbe. Pour cela, le pratiquer après une douche chaude est des plus indiqués. On pourra même, par la suite, laisser reposer une serviette d’eau chaude sur les parties à raser pour faciliter l’opération

7 – Choisir des produits naturels

Le rasage à l’ancienne ne peut s’effectuer avec les produits modernes (mousses, gels) contenant parfois des composants chimiques ne pouvant garantir une mousse homogène en tenue et en humidité. On fera appel à un savon à raser naturel d’où l’on montera, soit au bol, soit sur le visage, une mousse épaisse à l’aide d’une brosse spéciale composée de soies de porc, de crin de cheval ou, mieux encore, de poils de blaireaux. L’usage du blaireau masse la peau, lui conférant une souplesse incomparable sur laquelle le fil du rasoir n’aura aucun mal à trancher le poil net et bien.

8 – Apprendre le bon geste

Vient alors le grand moment… Le sabre dans une main selon une position et un angle particuliers, l’autre tendra la peau. Puis, on s’efforcera d’amener le plus possible les zones à raser sur les parties « dures » (os, maxillaires…) et de laisser glisser la lame en actionnant davantage le poignet que le bras. Le résultat obtenu est incomparable.

9 – Soigner les finitions

En touche finale, beaucoup aiment utiliser une pierre d’alun qui cautérise les micro-coupures ; d’autres s’aspergent le visage d’un après-rasage. L’eau froide suffit à l’opération.

10 – Persévérer

Le pire ennemi est de vouloir aller trop vite. Combien se sont découragés parce qu’ils n’obtenaient pas le rasage de leurs rêves en quelques semaines ! Une pratique régulière et/ou une formation adéquate sont indispensables. Les débuts peuvent paraître fastidieux mais lorsque l’on a passé le cap de 6 à 8 mois d’apprentissage, il est hors de question d’envisager un autre mode de rasage !

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